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Séminaire IGP 2022 (4) : Grand Paris – Grand Tokyo La métropole par les parcs

Inventer le Grand Paris / LabEx Futurs Urbains

 

Grand Paris – Grand Tokyo

La métropole par les parcs

 

 

Jeudi 24 novembre 2022, 9h00-18h00

 

 

École des Ponts ParisTech

Salle Vicat 002

Cité Descartes : accès au 12 boulevard Copernic, 77455 Champs-sur-Marne

https://www.ecoledesponts.fr/venir-lecole

 

 

Inscription obligatoire

https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSeYsJF3t7ZNny3bvs6fcMsH06SNtKzQN7_9fWeGyjPej2jC5Q/viewform?usp=pp_url

 

 

Organisation scientifique

Nicolas Fiévé, Yoko Mizuma, Frédéric Pousin, Nathalie Roseau

 

 

 

Dans le cadre de la perspective d’une histoire croisée des métropoles, cette journée d’études propose de faire dialoguer les histoires du Grand Paris et du Grand Tokyo autour de questions partagées. Pour interroger l’histoire du Grand Tôkyô dans ses relations au Grand Paris, nous faisons le choix de privilégier un objet métropolitain original et stratégique, le parc urbain, qui permettra d’aborder les dimensions paysagère et environnementale de la fabrique métropolitaine, mais également la question de la croissance urbaine et de ses limites.

Les travaux consacrés aux parcs publics en Europe sont nombreux et ils ont souvent souligné le rôle de ces derniers en tant qu’instrument du changement culturel. Au service d’un ordre social qui se met en scène, le parc public a constitué un levier des politiques hygiénistes. La confrontation à la culture japonaise nous incitera à porter une attention particulière aux pratiques sociales spontanées qui échappent aux modèles et qui expliquent l’attachement des populations aux espaces de nature. L’histoire croisée permettra également d’interroger les conditions spécifiques d’apparition des plans d’espaces verts et la place qu’y jouent les parcs publics. Les notions de « ceinture verte » et de « systèmes de parcs », qui ont traversé l’histoire métropolitaine au cours des XIXè et XXème siècles, seront ainsi interrogées à travers les démarches de planification à grande échelle engagées et réalisées.

Lors de cette journée, nous nous attacherons à examiner les discordances temporelles, ou encore la variété des fonctions que les conditions de la croissance urbaine ou les vicissitudes historiques font jouer à ces objets métropolitains.  Quelles sont les périodes fécondes pour l’invention et la réalisation des parcs publics pour le Grand Tôkyô et le Grand Paris ?  Quand et dans quelles conditions les problématiques environnementales viennent-elles s’imbriquer avec la construction des parcs ?  Comment se dessine la notion du « parc public » et ses appropriations, de quelle façon s’inscrit-elle dans l’art des jardins, quels rôles joue-t-elle dans la planification territoriale à grande échelle et quelles relations noue-t-elle avec d’autres grands artefacts urbains ?

Le croisement des regards entre Paris et Tokyo se fera au sein de plusieurs sessions. Elles associeront des chercheurs qui aborderont les situations française/européenne et japonaise, autour de fils conducteurs communs.

 

 

 

Programme de la journée

9h00-9h15

Accueil et café

 

9h15-9h45

Introduction scientifique

Yoko Mizuma, Frédéric Pousin, Nathalie Roseau

 

10h-10h30

L’invention des parcs publics au Japon : d’Edo à Tokyo

Ryohei Ono 小野良平(projection)

Les parcs urbains modernes du Japon sont nés d’une réflexion essentielle sur la manière d’envisager une ville idéale et de positionner les parcs dans cette vision. En ce sens, elle est à dissocier de la culture des jardins de la période Edo. L’œuvre pionnière est l' »ordonnance de révision municipale de Tokyo », promulguée en 1888. Sur la base d’ambitions fortes, un certain nombre de nouveaux parcs ont été envisagés à Tokyo, mais beaucoup d’entre eux n’ont jamais été réalisés. Quelle est la cause de ce décalage entre l’idéal et la réalité ? Comment la recherche de fonctions et de concepts abstraits, caractéristique des parcs japonais, est-elle apparue ? Cette présentation examinera les possibilités et les défis que cette idéologie a représentés pour les parcs urbains au Japon.

 

10h30-12h00

Session 1 : Parcs et formes urbaines

 

L’expansion métropolitaine et le défi des parcs des villes nouvelles au Japon

Toshitaro Minomo 蓑茂寿太郎 (projection)

Dans le processus d’expansion des zones métropolitaines d’après-guerre, le plus grand défi fut la construction de zones résidentielles pour les résidents urbains. Au Japon, trois grandes aires métropolitaines, Tokyo, Osaka et Nagoya, ont été créées à l’ère moderne, et plusieurs villes nouvelles de grande envergure ont été construites dans les banlieues. Dans le cadre du processus de création de ces villes nouvelles, des concours d’aménagement paysager ont été organisés. Lors de ces concours, quels furent les caractéristiques et les modèles de conception de l’époque, et qu’est-ce qui a été incorporé dans les conceptions réelles ? Cette conférence résumera également comment, plus de 50 ans après la naissance des villes nouvelles au Japon, les techniques et les connaissances acquises grâce à ces villes nouvelles ont apporté une contribution significative à la politique actuelle en matière de parcs et d’espaces verts.

 

Entre Aulnay et Villepinte, la campagne au parc du Sausset

Sonia Keravel

En limite des communes d’Aulnay-sous-Bois et de Villepinte (Seine-Saint-Denis) au nord-est de Paris, le parc départemental du Sausset est un projet qui s’inscrit dans une politique environnementale à l’échelle régionale visant à rééquilibrer la répartition des boisements entre le nord et le sud de la métropole parisienne. Nous montrerons comment ce parc, dont la réalisation s’étire sur près de 20 ans (1983-2004) est conçu dès son origine dans le continuum des tracés urbains et comme une manière de « ressouder le territoire[1]» et de concilier la ville et la nature en s’inspirant de la campagne.

 

Discussion animée par Ursula Wieser.

 

 

12h30 : Déjeuner

 

 

 

14h00-15h30

Session 2 : Le legs des structures historiques

 

Le « parc public » au Japon (1868-1930).

Circulation et appropriation d’une notion, Shinjuku Goyen

Yoko Mizuma水眞洋子

Shinjuku Gyoen est un jardin impérial réalisé au début du XXe siècle. Situé au cœur de la capitale Tokyo, à cheval sur les quartiers de Shinjuku et de Shibuya, ce jardin a été le premier projet franco-japonais, conçu et réalisé par un horticulteur japonais, Hayato Fukuba, et un paysagiste français, Henri Martinet, disciple d’Edouard André, célèbre paysagiste français du XIXe siècle. Le jardin, depuis sa création, a joué un rôle pionnier de « laboratoire » pour l’horticulture et l’art des jardins, dont la philosophie s’est appuyée sur celle de l’école française du paysage, élaborée sous le Second Empire.  Parallèlement à ce jardin, une autre école de paysage existait au sein de l’Université impériale de Tokyo, dans la faculté de sylviculture, dirigée par Seiroku Honda. À la différence de la première, cette école s’est appuyée sur les sciences forestières dont la conception a été basée sur « fonctionnalisme ».  Les deux écoles ont vu naître de nombreux jeunes paysagistes qui contribueront à la construction des parcs publics, à la suite de la promulgation de la nouvelle politique d’urbanisme.  Cette communication montrera la contribution de l’école française du paysage à l’évolution du « Parc public ».

 

Héritages métropolitains. Le Parc de Sceaux

Stéphanie de Courtois

En 1924, lorsque le Département de la Seine acquiert le domaine de Sceaux, le parc constitue une pièce de choix dans le dispositif auquel de nombreux urbanistes s’attachent pour refaire de Paris une ville vivante, vivable et à la mesure de la pression urbaine qu’elle subit. Initialement dessinés par Le Nôtre, le domaine de près de 220 hectares est alors dans un grand état d’abandon ; tournant le dos au passé princier pour en faire un espace largement ouvert au public citadin, les projets se succèdent pour reprendre le parc et en réorienter les objectifs, d’abord par Jean Claude Nicolas Forestier (1861-1930), puis par Léon Azéma (1888-1978), architecte de la Ville de Paris. Si le lotissement d’une large part à l’est se fait progressivement et presqu’inexorablement, le domaine fait l’objet d’une intense transformation qui continue jusqu’aujourd’hui, aussi bien – et c’est ce qui en fait l’intérêt – à l’échelle métropolitaine de l’assainissement, des flux ou des infrastructures de sport, que de celle des parterres ou de la statuaire.

La communication se concentrera sur l’intense période de la reprise du parc. Épousant les riches débats et espoirs contemporains quant au rôle des anciens parcs, tout comme ceux sur la restauration des parcs et jardins, le destin du parc reflète les projections faites sur ce qui devint avant l’heure un équipement du Grand-Paris sans renoncer à offrir l’expérience du jardin.

 

Discussion animée par Ursula Wieser.

 

 

 

 

15h45-17h15

Session 3 : Figures du plan : La ceinture verte

 

L’ »Espace libre » et son développement dans la ceinture verte au Japon

Noriko Akita秋田典子

Le concept français d' »espace libre » a été introduit comme politique d’espace vert dans les premières années de la modernisation du Japon. Introduit pour la première fois au Japon par Hiroshi Ikeda en 1919, le concept d' »espace libre » a d’abord été accepté mais s’est progressivement transformé sous l’influence des plans de reconstruction du grand tremblement de terre du Kanto de 1923 et de la Conférence internationale d’urbanisme tenue à Amsterdam en 1924. Cette présentation se concentrera sur Hiroshi Ikeda, qui a introduit ce concept, et tentera de répondre à la question difficile de savoir comment le concept d' »espace libre » a été reçu au Japon et comment il a conduit au concept de ceinture verte.

 

La ceinture verte : une figure de l’aménagement réactualisée ?

Réflexions à partir du cas francilien

Morgane Flégeau

Les ceintures vertes, d’abord conçues pour limiter l’extension des villes, connaissent un grand succès dans la première moitié du XXe siècle (Amati, 2008). Le cas de la Green Belt londonienne est certainement aujourd’hui l’exemple le plus connu. En Île-de-France, une ceinture verte est mise en place sur ce modèle de planification urbaine, mais de manière tardive et timide. L’institution régionale l’utilise dans les années 1980 dans l’optique de contrôler l’urbanisation, en entourant le cœur de l’agglomération d’une ceinture d’espaces agricoles, forestiers et naturels. La Ceinture verte d’Île-de-France n’a pas été accompagnée de contraintes règlementaires et n’a pas fait l’objet d’un projet global, ce qui explique son existence en demi-teinte. Pourtant cet outil d’aménagement est aujourd’hui convoqué dans les projets d’aménagement métropolitains, en particulier dans le cadre du Grand Paris.

 

Discussion animée par Corinne Tiry-Ono

 

 

Clôture de la journée

 

 

 

Biographies des intervenants (par ordre alphabétique)

Noriko Akita秋田典子is a CNRS invited researcher at ENSA-Paris Belleville. Doctor of Engineering (2004, University of Tokyo) for her research on land use control systems of green space conservation, she is a professor at Chiba University. She is a member of central government committees on land policy and municipalities. She is also a board member of the Japanese Institute of Landscape Architecture and City Planning Institute of Japan. Author of several books, including « Urban Services to Ecosystems-Green Infrastructure Benefits from the Landscape to the Urban Scale” (Springer, 2021).

 

Stéphanie de Courtois est docteur en histoire de l’art (Paris 1) et poursuit ses recherches sur le patrimoine paysager français et européen, sa valorisation et ses acteurs. Elle contribue à sa meilleure prise en compte, notamment par ses engagements dans différentes instances, dont la Commission nationale de l’architecture et du Patrimoine. Au sein du Léav – Laboratoire de l’École d’architecture de Versailles –, elle coordonne l’axe 3 du Patrimoine, héritage et création. Maître de conférence dans le champ Ville et Territoire, elle enseigne, en particulier au sein du Master 2 Jardins historiques, patrimoine, paysage, dont elle est responsable scientifique et pédagogique, en partenariat avec l’université Cergy Paris Université.

 

Morgane Flégeau est maitresse de conférences en géographie et aménagement à l’université de Lorraine. Ses travaux de thèse ont porté sur la Ceinture verte d’Ile-de-France dans une perspective urbanistique, environnementale, paysagère et sociale. Elle s’intéresse aujourd’hui de près à la prise en compte des questions environnementales et écologiques dans les politiques publiques, notamment urbaines.

 

Sonia Keravel est paysagiste DPLG, docteure de l’EHESS et maîtresse de conférences en théorie et pratique du projet de paysage à l’Ecole Nationale Supérieure de Paysage de Versailles-Marseille. Au sein du Laboratoire de Recherche en Projet de paysage (LAREP), ses domaines de recherche sont la critique de projet et l’histoire du paysagisme, la spécificité de l’approche paysagère des espaces métropolitains et le rôle des représentations visuelles, notamment de la photographie, dans la pratique paysagiste.

 

Toshitaro Minomo 蓑茂寿太郎 graduated Tokyo University of Agriculture in 1973, and was involved in education and research about landscape architecture in there until 2006 (now professor emeritus). He is doctor of Agriculture (1988, Tokyo University of Agriculture) for his research on “A Planning Study on the Layout of Urban Parks”. As the first president of the Registered Landscape Architect (RLA) in Japan, he has made long-term contributions to the development of the field of landscape architecture in both research and practice. He was the former President of the Japan Institute of Landscape Architecture.

 

Yoko Mizuma 水眞洋子 est ingénieure d’étude auprès du LabEx « Futurs Urbains », en charge de l’encadrement scientifique du site web « Inventer le Grand Paris ». Diplômée en sylviculture de l’Université de Ryûkyû à Okinawa au Japon (2001), en paysage (CESP) à l’École Nationale Supérieure de Paysage à Versailles (2010), Yoko Mizuma est docteur en science du paysage. Ses travaux portent sur les sujets concernant le paysage, à diverses échelles, celle du jardin, de l’espace urbain et celle du territoire, tout en mettant en lumière le croisement des différentes cultures, notamment franco-japonaise et l’interdisciplinarité. En parallèle à sa recherche, elle développe son champ d’activité pour établir des passerelles entre les professionnels français et japonais.

 

Ryohei Ono 小野良平is the President of the Japanese Institute of Landscape Architecture. He is professor, College of Tourism, Rikkyo University. Doctor of Agriculture (1999, University of Tokyo). He worked at Nikken Sekkei Ltd., a leading architectural design firm in Japan, and at the University of Tokyo as an assistant professor and associate professor. His representative book, « The Birth of Parks » (2003), analyzes the formation process of modern urban parks in Japan. He has contributed to research fields such as cultural landscape, historical landscape, and religious space.

 

Frédéric POUSIN est architecte, directeur de recherche au CNRS au sein de l’Unité Mixte de Recherche : Architecture, Urbanisme, Société. Savoirs, Enseignement, Recherche (AUSser). Ses travaux portent sur les savoirs et les représentations qui fondent le domaine de l’architecture, de la ville et du paysage. Il a dirigé le projet de recherche financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR), Photographie et paysage : Savoirs, pratiques, projets (http://photopaysage.huma-num.fr/). Il co-anime avec Nathalie Roseau le programme de recherche collectif Inventer le Grand Paris. Histoire croisée des métropoles ( http://www.inventerlegrandparis.fr/). Il est rédacteur en chef des Cahiers de la recherche architecturale, urbaine et paysagère (https://journals.openedition.org/craup/).

 

Nathalie Roseau est architecte-ingénieure, docteure en urbanisme. Elle est professeure à l’École des Ponts et directrice de recherche au Laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés (UMR CNRS). Ses travaux, qui privilégient une perspective historienne, portent sur les dynamiques de transformation métropolitaine et la place des infrastructures, leurs temporalités et leurs représentations. Elle a codirigé plusieurs programmes de recherche sur l’histoire de la culture aérienne, la gouvernance des grandes métropoles et, depuis 2017, co-anime avec Frédéric Pousin le programme « Inventer le Grand Paris » du LabEx Futurs Urbains. Elle a été professeure invitée au Politecnico di Milano (2009-2015)

 

Corinne Tiry-Ono est architecte DPLG, docteure de l’EPHE et professeure dans le champ Villes et territoires à l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-Val de Seine. Elle est chercheure associée au Centre de recherche sur les civilisations de l’Asie orientale (CRCAO) et vient de rejoindre le Centre de recherche sur l’habitat (CRH) de l’UMR LAVUE. Ses travaux portent sur le rôle des infrastructures de déplacement dans la construction des métropoles japonaises.

 

Ursula Wieser Benedetti est paysagiste et docteure en Histoire et civilisations, spéc. architecture et paysage (EHESS). Elle est membre du Centre de Recherches sur le Japon (CRJ- EHESS) et du réseau JAPARCHI. Ses thématiques de recherche portent sur les jardins japonais et sur l’art des jardins en Belgique. Elle est actuellement curatrice ‘Jardin, Paysage’ à la Fondation CIVA à Bruxelles.

 

 

Figure 1 :

Hama Rikyu, Tokyo @ Nathalie Roseau