URBANISMEAu Conseil de Paris, la bataille du périphérique ne fait que commencer

Au Conseil de Paris, la bataille du périphérique ne fait que commencer

URBANISMEToutes les forces politiques du Conseil de Paris souhaitent transformer le périphérique parisien, mais elles ont chacune une vision bien différente
Vue sur le périph', un argument de vente imparable.
Vue sur le périph', un argument de vente imparable. - Philippe Dannic/SIPA / SIPA
Guillaume Novello

Guillaume Novello

L'essentiel

  • Il sera encore question du périphérique au prochain Conseil de Paris qui débute ce mardi, avec des vœux émanant de différents groupes politiques.
  • L’un d’entre eux, porté par les écologistes, vise à l’instauration d’un moratoire des constructions aux abords du périph afin de mettre en place une vraie ceinture verte.
  • L’urbanisation de ces zones fait en effet débat au sein même de la majorité municipale.

A bientôt 50 ans, le boulevard périphérique a besoin d’une remise en beauté. Et faute d’aller sur M6, les élus parisiens de tous bords avancent leurs préconisations, du simple lifting à la chirurgie lourde, en passant par le remodelage. Alors, en tête de liste, il y a la solution préconisée par la mairie de Paris, qui souhaite le transformer en boulevard urbain 2x3 voies à l'horizon 2030 pour en faire une ceinture verte, mais les détails restent flous. C’est pourquoi les autres forces politiques entendent bien avancer leurs idées en déposant des vœux au prochain Conseil de Paris qui débute ce mardi. Ce qui risque de mettre un sacré bazar.

En premier lieu, le vœu qui sera déposé par le groupe écologiste « relatif à un moratoire sur les constructions aux abords et au-dessus du périphérique ». Les Verts reprochent à la municipalité (dont ils font partie) d’urbaniser à tout va les talus du périphérique, où se trouvent les derniers mètres carrés de foncier disponible dans la capitale. « C’est une infrastructure extrêmement polluante qui met en danger les 500.000 habitants qui vivent à proximité, affirme Emile Meunier, président EELV de la commission d’urbanisme. Il ne faut surtout pas exposer de nouvelles personnes au danger et ne plus faire de nouvelles constructions aux abords du périph. »

Les assos en PLS au bord du périph

Une position que partagent plusieurs associations écologistes comme les Amis de la Terre dont la section parisienne a publié le 15 juin une série de tweets mettant en valeur l’urbanisation à vitesse grand V des abords du périphérique, en contradiction avec le projet d’Anne Hidalgo d’en faire une ceinture verte. « La communication de la mairie est diamétralement opposée à ce qu’elle fait, elle bétonne !, dénonce Pierre-Alexis Hulin, des Amis de la Terre. Il ne faut pas dire que c’est pollué, mais il faut construire le moindre m². Pour le réaménagement de la porte de Montreuil, on a abattu 300 arbres ! »

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Tony Renucci, de l’association respire, est sur la même ligne : « Il n’y a pas d’études sanitaires qui exposent les conséquences de vivre à proximité du périphérique. Personne ne s’y risque, car les résultats seraient catastrophiques ! Mais on connaît les effets de la pollution de l’air et le transport routier est le deuxième émetteur. Il est incompréhensible de construire près du périphérique. Créer une ceinture verte ? Oui, sauf si c’est pour cacher la bétonisation. C’est complètement contradictoire. A Porte de Vincennes, on projette de construire une résidence étudiante, ça ne va pas dans le bon sens. » Il conclut :

« Ce n’est pas possible de construire des lieux de vie à proximité du périphérique. » »

Le vœu écolo a semblé un temps trouver une oreille attentive du côté du groupe Changer Paris, qui finalement s’abstiendra. « C’est la fable du boulevard urbain et la légende des arbres plantés, critique Valérie Montandon, élue LR du 12e arrondissement. Porte de Vincennes, ils ont supprimé les talus pour construire des bureaux. La ceinture verte s’annonce très segmentée ! » Comme pour désamorcer cela, Emmanuel Grégoire, premier adjoint, a indiqué jeudi en pré-conseil qu'« il y aura probablement sur ce sujet [l’urbanisation des abords du périphérique] un vœu de l’exécutif qui en fera la synthèse. Nous voulons concevoir des projets urbains qui respectent le PLU bioclimatique, et ne plus faire ceux qui ne le respecteraient plus. Mais il est évident que nous voulons une ceinture verte et pas une ceinture grise. »

Faut-il aménager pour casser une frontière ?

Mais la majorité socialiste devra aussi compter avec leurs alliés communistes qui ont une autre vision que les écolos. « Nous sommes pour la transformation, pas pour l’immobilisme, prévient Nicolas Bonnet-Oulaldj, président du groupe Communiste et Citoyen. On ne peut pas dire comme les écologistes que plus rien ne bouge tant qu’on a de la pollution. » C’est pourquoi il préconise de lutter contre les émissions de polluants en mettant en place au plus vite la zone à faible émission (ZFE), en développant les aides pour la conversion des véhicules thermiques en véhicules électriques, en créant une ligne de métro le long du périph et en augmentant le fret fluvial et ferroviaire pour décharger le routier. « Ce n’est pas un problème d’urbanisme mais de mobilités », résume-t-il.

En parallèle, « les habitants à proximité du périphérique sont souvent en manque d’équipements donc il faut les créer pour leur éviter la double peine de vivre dans une zone polluante et bruyante où il n’y a rien », avance Nicolas Bonnet-Oulaldj. De même, produire du logement est crucial car « il y a un manque, notamment du social, et sinon, on n’arrivera jamais à 25 % de logements sociaux », met-il en garde.

Un argument qui ne convainc pas Pierre-Alexis Hulin : « Quand on sait qu’il y a 1,3 million de logements à Paris, en construire quelques milliers de plus n’aura aucun effet. » Et pour Emile Meunier, « il faut s’interroger sur la qualité de vie dans les futurs logements au bord du périphérique ». Enfin, l’élu communiste veut « aménager » pour « effacer le périphérique comme barrière » et mettre en place des « continuités urbaines ». S’il partage le même objectif, l’élu vert craint au contraire qu’on ne « recrée une frontière de bureaux de chaque côté du périph ».

Derrière cette question de l’urbanisation du périph il y a aussi une question de gros sous, soulignée par ses contempteurs. « Urbaniser, c’est de la rentabilisation financière, il faut ramener de l’argent à la ville », signale Tony Renucci. Construire pour alimenter les caisses, cette hypothèse avait été avancée par Le Parisien dans un article​ titré Malgré la pollution, pourquoi construit-on encore tout près du périphérique ?, lequel article avait été vilipendé par Emmanuel Grégoire, lors d’une conférence de presse peu après. « La mairie, souvent en passant par des aménageurs, vend des terrains à des promoteurs, terrains dont la valeur est fonction de ce que l’on peut construire dessus. Et cela peut aller jusqu’à 7.000 – 8.000 euros du m²», explique Emile Meunier. Valérie Montandon renchérit : « Les bords du périphérique sont les derniers biens fonciers. Ils représentent une manne financière et sont utilisés à des fins budgétaires. »

Les autres propositions sur le périph

Les écologistes présentent un autre vœu visant à baisser la vitesse à 50 km/h sur le périphérique pour limiter pollution et nuisances sonores. Anne Hidalgo s’était dite favorable à la mesure en 2019 avant que celle-ci ne soit évacuée par la majorité en place. « A titre personnel, je pense que c’est un élément très important, indiquait jeudi David Belliard, adjoint EELV en charge de la voirie et un peu pris entre deux feux. Je ne vais pas me dédire, je l’ai porté pendant la campagne. Nous souhaitons aller vers un boulevard urbain mais ça ne sera pas demain. Cadencer ne veut pas dire renoncer. » Ce ne sera donc pas pour demain, ni après-demain.

Côté Changer Paris, on demande le déploiement d’écrans acoustiques le long du périph pour réduire les nuisances sonores et on souhaite une étude sur l’opportunité et la faisabilité de recouvrir le périphérique. De manière plus générale, « il y a besoin d’une étude globale sur l’aménagement du périph, une vraie réflexion prend du temps, estime l’élue LR Valérie Montandon. Par exemple, on ne peut pas imaginer un boulevard urbain si on n’intègre pas que plusieurs autoroutes, comme l'A1 ou l'A4, se déversent dans le périphérique. »

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